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Ulysse from Bagdad

 » Je m’appelle Saad Saad, ce qui signifie en arabe Espoir Espoir et en anglais Triste Triste ; au fil des semaines, parfois d’une heure à la suivante, voire dans l’explosion d’une seconde, ma vérité glisse de l’arabe à l’anglais ; selon que je me sens optimiste ou misérable, je deviens Saad l’Espoir ou Saad le Triste. « 

Couverture du livre paru chez Albin Michel.

À partir d’une réécriture du mythe d’Ulysse et des passages les plus célèbres de l’Odyssée d’Homérus, Eric-Emmanuel Schmitt plonge dans une thématique intemporelle mais qui prend de l’intensité actuellement : la migration. C’est en 2008 que paraît Ulysse from Bagdad aux éditions Albin Michel.

Ulysse from Bagdad c’est l’histoire de Saad Saad aux deux visages. Saad l’Espoir en arabe, Saad le Triste en anglais. C’est avec cette introduction onomastique que l’auteur nous donne le ton. Il sera question de voyage, d’exil, de perte et de quête d’identité pour un personnage apatride.

Saad Saad, le jeune irakien fuit la guerre qui a tué son père, révolutionnaire. La guerre qui emprisonne sa famille et le contraint à quitter ce pays qui le rejette afin de gagner l’Angleterre pour travailler et faire venir sa famille. Sadam Hussein et son régime a tué son identité.

Des obstacles vont se dresser devant cet Ulysse moderne : le Géant de l’administration, les Sirènes metalleuses, les narcotrafiquants Lotophages, la Calypso italienne. Saad Saad, perdu, se confie au fantôme de son père tout comme le héros de l’Epopée d’Homer. Sa seule raison de retourner dans cet enfer qu’est son pays natal serait de venir chercher sa Pénélope : Leila.

C’est avec un personnage double, au seuil de deux cultures qui le rejettent qu’Eric-Emmanuel Schmitt décide de parler des conditions de vie d’un émigré. Quitter un pays détruit, une famille terrifiée mais aussi une culture c’est quitter son identité mais c’est aussi une obligation. Une traversée illégale, dangereuse, qui profite aux passeurs ; l’enfermement dans des camps de réfugiés avec la peur au ventre d’être rapatrié, la volonté de s’en sortir en vivant dans des squats insalubres, de petits boulots mal payés sont les réalités d’un être en exil, s’il survit au voyage. Bien qu’il ait surpassé tous ces obstacles, Saad Saad se heurte à une autre impasse : l’acceptation. Il ne fait plus partie d’un pays qu’il a quitté, mais il ne fait également pas partie de son pays d’accueil.

Schmitt nous fait grandir en modernisant un mythe, en donnant la parole à ceux que l’on fait taire et que l’on ignore.

Apolline-Charlotte Langlois

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